Devinette : qu’y a-t-il de commun entre Hollywood, la bioéthique et le cancer ? La “médecine prédictive” bien sûr.
Rappelez-vous, on en avait beaucoup parlé à la suite de la décision d’Angelina Jolie de subir une double mastectomie. Si la star avait décidé de passer sur le billard, c’est pour éviter un fort probable cancer du sein. Sachant qu’elle est porteuse d’une mutation du gène BRCA1 (responsable de ce cancer), et que sa mère était décédée à la cinquantaine de cette même maladie, on peut difficilement remettre en question sa décision. La chirurgie, seule solution ? “C’est la seule solution qui va faire passer le risque de cancer du sein de 87% à moins de 5% (autour de 2%)”, résume, lapidaire, la docteure Bérangère Arnal dans Atlantico.
Connaître votre avenir grâce un test génétique, ça vous tente ?
La “médecine prédictive”, c’est donc ça. En quelque sorte, accéder au vieux rêve (ou cauchemar, c’est selon) de l’humanité : connaître son avenir. Pas de diseuse de bonne aventure derrière tout ça, mais bel et bien une nouvelle vision de la santé qui suppose d’évaluer, grâce à la génétique, le risque de développer une maladie future chez une personne saine.
La médecine prédictive repose sur l’utilisation de tests génétiques. En effet, on estime que “5 % à 10 % de la plupart des cancers fréquents (sein, côlon, ovaire, endomètre…) sont liés à un facteur génétique, en général hérité de l’un des deux parents”, souligne Dominique Stoppa-Lyonnet, cheffe du service de génétique de l’Institut Curie, interrogée par Le Monde. A quand la généralisation des tests génétiques, alors ? La spécialiste met le holà : “Ils ne permettent pas de dire si une personne donnée va ou non développer avec certitude un cancer et quand. Lorsque l’on dit que l’altération de certains gènes est associée à un risque élevé de cancer, il s’agit d’une moyenne”.
Faut-il tout savoir ?
Car ces tests génétiques ont de quoi faire flipper, surtout quand l’on sait que sont répertoriées 7000 maladies génétiques. Et que certaines sont incurables. Faut-il tout savoir, et surtout, faut-il tout dire ? C’est l’une des questions de bioétique à laquelle sont confrontés les patients, mais aussi les médecins. Car si vous apprenez que vous avez une forte probabilité de développer un cancer de sein… votre soeur aussi. Et votre fille. Mais veulent-elles le savoir?
Pour certains, les tests génétiques permettent justement d’éviter de transmettre une maladie pénible à son enfant à naître. On parle alors de diagnostic prénatal et, plus récemment, de diagnostic préimplantatoire. La différence entre les deux ? La grossesse n’a pas encore commencé que vous pouvez déjà savoir si le futur bébé sera porteur d’une bizarrerie génétique ou pas.
Vous avez dit eugénisme ?
« Ceux qui évoquent un risque d’eugénisme… Je leur réponds qu’ils ont raison ! En France, quand vous faites un enfant après 38 ans, on vous propose de nombreux tests pour savoir s’il est trisomique. S’il l’est, cela ne pose plus de question éthique à personne – hormis les parents bien entendu – d’interrompre la grossesse”, répondait, cash, le docteur Pascal Pujol, oncogénéticien au CHU de Montpellier, au magazine médical “H”.
Et la loi dans tout ça ? Elle stipule qu’un médecin doit attester que le couple a une forte probabilité de donner naissance à un enfant atteint d’une maladie génétique grave et incurable au moment du diagnostic. Soit. Mais le hic, c’est qu’à l’heure actuelle, aucune liste ne recense les anomalies détectables pour lesquelles serait autorisé un diagnoctic préimplantatoire, et donc l’exclusion de certains embryons avant de les implanter dans l’utérus de la future mère.
Ces avancées de la médecine nous confrontent à des questions difficiles… Comment juger une famille qui refuse de donner naissance à un enfant porteur d’une maladie grave ? Mais où mettre la limite dans cette sélection des bébés à naître ? Qu’en pensez-vous?