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Entretien

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Philippe Deverchère, expert dans la lutte contre la pollution lumineuse

11 millions de points lumineux en France... quels impacts ?

Philippe Deverchère, expert en pollution lumineuse © Photo personnelle

Paru le 31 janvier 2023

Ecrit par Mathilde de Mon Quotidien Autrement

Philippe Deverchère, 64 ans, est directeur technique depuis 2016 chez DarkSkyLab, une entreprise qui étudie la pollution lumineuse et ses impacts sur les écosystèmes afin de conseiller acteurs privés et publics dans leur utilisation de l’éclairage. À Mon Quotidien Autrement, il explique ces impacts et les moyens de lutter contre.

Qu’est-ce qui vous a amené à vous intéresser à la pollution lumineuse ?

J’étais astronome amateur et je développais des logiciels pour les astronomes professionnels, en plus de mon travail officiel pour des grandes sociétés informatiques. L’astronomie s’intéresse à des objets faiblement lumineux, donc la pollution lumineuse les rend très difficile à observer. Le problème s’est développé à partir des années 1960. Puis je me suis rendu compte que l’astronomie n’était que la partie émergée de l’iceberg en ce qui concerne le problème de la pollution lumineuse. Celle-ci a un impact beaucoup plus sérieux sur la biodiversité et le fonctionnement des écosystèmes.

Quels sont ces impacts ?

La pollution lumineuse s’exprime de deux façons. Il y a la création d’un halo, ce sont les grandes zones de lumière un peu hémisphériques que l’on voit lorsqu’on arrive vers une ville. Ceux-ci impactent beaucoup l’astronomie, ou bien les oiseaux migrateurs qui s’orientent grâce aux astres et à la voie lactée.
Mais ce qui impacte le plus la biodiversité, c’est la visibilité directe des sources lumineuses. Celles-ci vont représenter des pièges : des insectes ou des papillons sont par exemple attirés par les sources lumineuses au point de ne pas pouvoir s’en éloigner et de tourner autour jusqu’à l’épuisement. Cela contribue à la diminution de la biomasse des insectes, en plus des autres facteurs que sont l’utilisation des pesticides et la transformation de l’usage des sols. Cela change aussi la relation entre proies et prédateurs. Par exemple, certaines espèces comme la pipistrelle commune viennent chasser systématiquement autour des points lumineux. Ceux-ci contribuent également à fragmenter les espaces de vie des espèces lucifuges, qui fuient la lumière. Des chauves-souris comme le grand rhinolophe voient par exemple leur espace de vie restreint, ce qui limite leurs zones de reproduction et engendre un appauvrissement génétique de l’espèce. Suivant le nombre et l’intensité des points lumineux, cela peut donc avoir un impact sur la façon dont les espèces se déplacent, se nourrissent et se reproduisent.
Les impacts sur les végétaux sont par contre assez mal connus encore. Il y a tout de même des premières études qui montrent de manière non ambigüe que les cycles de bourgeonnement et de production de feuilles des arbres sont perturbés lorsque ceux-ci sont exposés de manière continue à la lumière.
Les impacts sont complexes à analyser car difficiles à isoler, parce que la lune apporte aussi de la lumière naturellement. Mais les espèces animales et végétales ont eu des millions voire des dizaines de millions d’années pour s’y habituer, alors que les émissions lumineuses d’origine anthropique [humaine] sont extrêmement récentes à l’échelle de l’évolution.

Y a-t-il aussi des impacts sur les humains ?

Oui. On sait que l’exposition à la lumière durant la nuit provoque l’arrêt de la sécrétion de la mélatonine, l’hormone du sommeil qui permet la réparation cellulaire pendant le sommeil. Être exposé à la lumière de nuit sur le long terme provoque des effets délétères : on est plus susceptible de développer du diabète, des maladies cardiovasculaires, voire des cancers.

D’où provient la pollution lumineuse ?

Elle est émise par l’humain au moyen de différents dispositifs dans l’environnement nocturne. Il y a bien sûr l’éclairage public, mais elle provient aussi énormément de l’éclairage privé, principalement par le biais des commerces, ou bien des zones industrielles et artisanales. Par exemple, entre Douai et Lille, il y a beaucoup d’entrepôts logistiques dont les parkings et les façades sont éclairés en continu… Les phares des voitures aussi contribuent à la pollution lumineuse.

Quels moyens peuvent être utilisés pour lutter contre la pollution lumineuse ?

Plusieurs lois sont apparues depuis les années 1970 pour limiter la pollution lumineuse, dont la dernière a été adoptée en France en 2018, sous l’impulsion de l’Union européenne. Cette loi impose des contraintes techniques à l’installation de nouveaux dispositifs d’éclairage public. Les 11 millions de points lumineux qui existent en France sont remplacés régulièrement. Désormais, il est interdit d’avoir des flux lumineux qui partent vers le haut et provoquent des halos. Les communes ont aussi un « budget lumens », pour ne pas éclairer plus d’une certaine surface de chaussée et de trottoir et éviter d’éclairer les endroits naturels. Elles doivent également choisir des ampoules qui donnent une couleur plutôt chaude, inférieures à 3 000 Kelvin, car ce sont les lumières froides qui se diffusent le mieux dans l’atmosphère. Mais cette loi est très imparfaite et malheureusement encore très mal appliquée. Sinon, souvent pour des raisons liées au coût de l’énergie, de plus en plus de communes éteignent l’éclairage public au cœur de la nuit.
Pour limiter les impacts de la pollution lumineuse sur les humains, les médecins spécialisés recommandent d’habituer les enfants à dormir dans le noir complet, d’éviter les veilleuses et les lumières intrusives qui proviennent de l’éclairage public. Il est aussi conseiller d’éviter de s’exposer à un écran le soir trente minutes à une heure avant le coucher, afin que notre corps sécrète de la mélatonine pour bien s’endormir.

Avis sur : Philippe Deverchère, expert dans la lutte contre la pollution lumineuse

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